Femmes En Tête 2025 – Sylvie Bauer

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Femmes En Tête 2025 – Sylvie Bauer

Professeure de littérature américaine (Etats-Unis) – Université Rennes 2

A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, nous présentons toute la semaine du 8 mars 2025 une série de portraits de femmes remarquables mises en avant par les sociétés savantes membres et associées du Collège des Sociétés Savantes Académiques de France.

  • Qu’est-ce qui a motivé votre choix de domaine d’études et de recherche ? Aviez-vous un modèle inspirant (parent, enseignant.e, personnage de la littérature, du cinéma…) ?

D’abord un contexte familial : j’ai grandi entourée de livres, avec une mère professeure d’espagnol et un père géophysicien ; grâce à eux, j’ai développé un goût prononcé pour la lecture très tôt. Puis, ce sont des rencontres marquantes lors de mes études et en particulier celle avec Jean-Jacques Lecercle, philosophe du langage, professeur à l’université Paris X-Nanterre, rencontre qui a abouti à un compagnonnage intellectuel, amical et politique décisif.

  • Sur quel sujet travaillez-vous ? En quoi est-il important pour la science ? pour la société ? Quelle est votre plus grande réussite dans votre domaine ?

Je travaille sur la littérature américaine contemporaine. Mes travaux tentent d’explorer le pouvoir du langage dans l’écriture de fiction afin de voir comment les actes d’écriture et de lecture sont des gestes qui relèvent d’un engagement et ouvrent la possibilité d’un espace politique. Ce lien entre politique et littérature semble d’autant plus pertinent dans le contexte d’une littérature contemporaine qui pousse à s’interroger sur les reconfigurations de l’humain dans un monde où la technologie occupe une place de plus en plus importante.

Les réussites sont toujours collectives, comme en témoigne tout particulièrement la collaboration heureuse que j’ai eue avec les membres de mon bureau lorsque j’étais présidente de la CP-CNU . Issus d’horizons scientifiques et politiques différents, nous avons appris à parler la même langue et à construire ensemble des réponses pour défendre le statut des enseignants-chercheurs mis à mal, entre autres, par la LPR.

  • Quels sont vos projets professionnels pour les prochains mois, les prochaines années ?

J’entreprends un travail sur le cliché, lieu (du) commun. Je vais analyser l’éventuelle « puissance d’agir » du cliché, afin de voir si et comment, d’une forme figée, peuvent surgir un espace des possibles et des perspectives politiques et historiques décentrées. L’ère de la post-vérité, nourrie d’affects et de formules toutes faites (de clichés) tend à récrire l’histoire, ouvrant une page où les fictions débitées sans filtres par certaines personnalités politiques ou médiatiques le disputent à une réalité factuelle, et tentent de construire un récit national à l’idéologie mortifère. Que peut alors la littérature, question qui, pour être ancienne et devenue cliché n’en mérite pas moins d’être sans cesse reposée ?

  • Dans quelles actions à caractère sociétal êtes-vous impliquée ? (diffusion des connaissances, mentorat, développement des relations science-société, promotion des femmes dans les sciences)

J’ai participé à des fêtes de la science et ai donné des conférences grand public à l’Université Populaire de Bagnolet ou à l’Institut franco-américain (Rennes) sur la question de l’humain dans le monde contemporain.

  • Avez-vous rencontré dans votre activité des difficultés (personnelles/sociales/structurelles) dues au fait d’être une femme ? ou au contraire, cela vous a-t-il parfois aidée ?

Être une femme n’a ni aidé ni entravé ma carrière. Cela dit, il y a eu malgré tout des comportements sexistes, lors de mon mandat à la CP-CNU, rares mais notables. Il y a même eu parfois des tentatives d’intimidation, ce qui m’a toujours laissée de marbre.

  • Quelle est la situation au plan de l’égalité F-H dans votre domaine ? Quelles sont vos suggestions pour que la situation puisse s’améliorer plus rapidement ?

Le champ des études anglophones est très féminisé. La multiplication des tâches chronophages, l’austérité budgétaire, le faible nombre de postes ouverts, une course au temps de plus en plus folle, (le plus souvent au détriment de l’enseignement et de la recherche), tout cela atteint l’ensemble des enseignant.e.s-chercheur.e.s et en particulier des femmes, plus promptes à assumer des tâches collectives. Les CRCT pour retour de congé maternité sont une bonne chose, mais les équilibres entre la vie professionnelle et la vie privée restent plus difficiles à trouver pour les femmes, ce qui se fait souvent au détriment de la recherche. Et puis, dans mon domaine comme ailleurs, c’est plus largement la question de la diversité qui se pose.

  • Quel message pouvez-vous donner aux jeunes filles pour les encourager à s’engager dans un parcours comme le vôtre ?

Je leur dirais d’être pleinement engagées dans ce qui les passionne, d’avoir toujours conscience de l’importance vitale de la recherche et de n’avoir jamais peur de rien.

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