Femmes En Tête 2024 – Marie-Ange Bueno

Le portail des sociétés savantes académiques en France

Femmes En Tête 2024 – Marie-Ange Bueno

A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, nous présentons toute la semaine du 8 mars 2024 une série de portraits de femmes remarquables mises en avant par les sociétés savantes membres et associées du Collège des Sociétés Savantes Académiques de France.

Qu’est-ce qui a motivé votre choix de domaine d’études et de recherche ? Aviez-vous un modèle inspirant ?

Dès mon enfance j’étais attirée par les matières scientifiques avec un contact fort avec les systèmes mécaniques, en particulier des objets réels car mon père était artisan-garagiste. L’objectif de devenir ingénieur, est venu très tôt dans mon esprit, mais pour travailler en entreprise. Ce n’est que lors de mon stage de dernière année d’école d’ingénieurs que, j’ai rencontré une docteure (la seule de l’entreprise) qui m’a impressionnée par sa compétence et son esprit d’analyse.

Sur quel sujet travaillez-vous ? En quoi est-il important pour la science ? pour la société ? Quelle est votre plus grande réussite dans votre domaine ?

Je travaille sur le textile, seul matériau alliant finesse, légèreté, déformabilité élastique, résistance et porosité. Il est donc utilisé dans divers secteurs (protection, médical, transports …). Je m’intéresse à la tribologie de ce matériau, donc à ses interactions en frottement en son sein ou dans son environnement (contre la peau par exemple). J’ai deux réalisations dont je suis particulièrement fière. La première est purement scientifique ; avec mon collègue Michel Tourlonias nous avons été les premiers à développer une méthode de mesure directe du frottement entre des fibres unitaires très fines ; cette méthode est reprise aujourd’hui par plusieurs équipes internationales. La seconde réalisation est du domaine de l’animation scientifique par la création, avec ma collègue Betty Semail de Lille, d’une communauté pluri-disciplinaire dédiée au tactile, le GDR CNRS TACT.

Quels sont vos projets professionnels pour les prochains mois, les prochaines années ?

Depuis la crise sanitaire, ma priorité est d’aider au mieux les industriels du textile à réindustrialiser tout en innovant. Je n’ai pas encore tout à fait trouvé comment faire cela pour une industrie constituée essentiellement de PME-PMI, encore peu habituée à la recherche, et ceci tout en respectant les attendus académiques (publications …) et avec les financements nécessaires.

Dans quelles actions à caractère sociétal êtes-vous impliquée ?

De part mon domaine de recherche tourné autour d’un objet qui fait partie de notre environnement, il m’arrive régulièrement d’en parler dans les médias ou dans d’autres communautés ou encore auprès du grand public (ex : science en fêtes). Je fais également des opérations de médiation scientifique, en particulier comme capitaine DECLICS, où la question du partage entre la vie professionnelle et la vie publique est au cœur des échanges car je suis une femme, ou encore via la promotion de la Mécanique via la plateforme dédiée de l’AFM (www.annee-mecanique.uha.fr).

Avez-vous rencontré dans votre activité des difficultés (personnelles/sociales/structurelles) dues au fait d’être une femme ? ou au contraire, cela vous a-t-il parfois aidée ?

Ni l’un, ni l’autre car j’ai eu une double chance. A titre professionnel, un de mes directeurs de thèse, avec qui j’ai fait de la recherche par la suite, m’a poussée pour progresser. A titre privé, avec mon conjoint, qui fait le même métier que moi, nous avons toujours fonctionné sur la base d’un équilibre des tâches. Par ailleurs, je n’ai ni un physique, ni une personnalité suffisamment avenante pour que la domination masculine puisse s’exprimer. La seule fois où j’ai été victime d’un geste déplacé j’ai réagi par le même geste, nous ramenant ainsi à égalité. Cependant, j’ai constaté de nombreux cas où cette domination patriarcale est présente de façon consciente ou non. De plus, j’ai été 10 ans au CNU et j’ai pu expertiser des dossiers de femmes mises au second plan (sans d’ailleurs qu’elles le mentionnent).

Quelle est la situation au plan de l’égalité F-H dans votre domaine ? Quelles sont vos suggestions pour que la situation puisse s’améliorer plus rapidement ?

Dans le domaine des sciences pour l’ingénieur, de la Mécanique, la situation est fortement déséquilibrée que ce soit au niveau des emplois à responsabilités ou des salaires (tout est sur la plateforme de la Mécanique). Le plus important est de faire de la pédagogie dès l’école primaire, jusqu’à l’enseignement supérieur. Dans de nombreux cas, les hommes n’ont pas conscience de leur domination et les femmes d’être dominées, que ce soit dans la vie professionnelle ou privée. Il faut diffuser des vidéos courtes, des témoignages, informer de l’existence de très bons podcasts sur le sujet …

Quel message pouvez-vous donner aux jeunes filles pour les encourager à s’engager dans un parcours comme le vôtre ?

Le genre n’a d’importance qu’en de très rares instants dans une journée et ils ne relèvent que de la vie privée. Aussi, ne pensez pas que vous êtes une fille, une femme et ne laissez personne vous ramener à cet état, suivez vos envies et vos objectifs. Ayez confiance en vous, osez et persévérez !

 

LinkedIn
LinkedIn
Share